prevision par les astres

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Ce dossier a été inspiré d'un article paru dans "pour la science" N°311 de septembre 2003 rédigé Par B. Orlove, J. Chiang et M. Clane.

S'il est un domaine où les scientifiques (et moi personnellement) doutent de son bien fondé, c'est l'astrologie. Et pourtant, force est de constater que pour une fois, astrologie et science font bon ménage...du moins en apparence car il s'agit pas du tout d'astrologie.

Les faits

Au Pérou et en Bolivie, à la fin du mois de juin, les fermiers se regroupent et montent au milieu de la nuit sur un point culminant des environs. Là, ils attendent l'apparition des Pléiades, constellation d'étoiles apparaissant au Nord-est bas sur l'horizon juste avant l'aube. Ils observent donc  et repartent avec en poche une prévision très fiable des pluies susceptibles de tomber au cours de la saison des pluies quelques mois plus tard. Cette prévision est vitale pour leurs plantations de pommes de terre. Selon que la saison des pluies arrive à temps (dans ce cas elle donne de bonnes précipitations) ou en retard (et dans ce cas elle donne des pluies déficitaires), la date de plantation et le rendement sera différent et mieux vaut prévoir à l'avance.

A bien y regarder, il s'agit d'astrologie, de croyance basée sur la position d'étoiles etc...Mais à bien y regarder, ils ne regardent pas la position, ils observent. Mais qu'observent-ils? Ils observent tout simplement l'éclat, l'apparence de la constellation en question: un éclat très bon, la visibilité de nombreuses étoiles indique une bonne saison; A contrario, une visibilité mauvaise où seules les étoiles les plus brillantes apparaissent indique une mauvaise saison. 0 noter qu'à cet endroit situé entre 12 et 19° au sud de l'équateur sur les contreforts est des Andes, le climat est tropical montagnard avec une saison sèche de mai à août et une saison des pluies d'octobre à mars. Au mois de juin, ce ne sont pas les nuages qui vont venir jouer les trouble-fête de ce cérémonial.

Véracité des prévisions

Sachant que soit la saison sera bonne soit elle sera mauvaise (une chance sur 2) cela revient à tirer à pile ou face si les prévisions étaient faites au hasard. Des observations faites sur 5 années (les auteurs ayant peu de recul dans leur chiffre mais une étude approfondie est en cours) donneraient une chance sur 32 d'avoir de bonnes prévisions sur 5 ans en choisissant au hasard donc soit 3%. Or les observations faites sur ces 5 années ont montré 100% de réussite par la méthode "astrologique". Il semble que leur méthode soit d'une inouïe précision et vérifié dans tous les cas où il était possible de le vérifier.

Explication

Pour des raisons climatologiques locales, les auteurs se sont tournés vers El Nino, le grand seigneur des lieux. Ce phénomène qui arrive périodiquement fait qu'un courant d'ouest en est s'établit sur le Pacifique, remplaçant le courant naturel d'est en ouest des lieux. Cela à pour conséquence d'apporter des eaux tièdes sur les côtes est d'Amérique du sud (remplaçant donc les eaux froides), de provoquer pluies et inondations sur les contreforts ouest des Andes (ordinairement des régions parmi les plus arides du monde) et de provoquer par contre sécheresse et incendies dans les forêts tropicales de l'autre côté du Pacifique en Indonésie, Philippines etc...

Mais chez nos fermiers, le phénomène El Nino  repousse les nuages de la saison des pluies qui arrive avec retard et amoindrie d'où des récoltes peu abondantes. Or il semble que les années avec El Nino, le ciel se couvre de cirrus (nuages très fins d'altitude) des mois à l'avance. Le ciel ordinairement si limpide (bonne visibilité des pléiades), se voile de façon imperceptible en présence d'El Nino (le ciel restant bleu) et cela rend la constellation moins nette. Quelques mois plus tard, comme il a été observé en juin par les fermiers, le temps évolue comme prévu selon la présence ou non d'El Nino.

Ainsi, depuis des centaines d'années, les habitants des lieux ont eu la faculté d'observer un phénomène arriver (en l'occurrence El Nino) de par une visibilité réduite d'une constellation, puis de constater ses conséquences sur la saison des pluies et leurs récoltes. La prévision est ici expliquée par un phénomène d'ampleur mondiale détectable plusieurs mois à l'avance

Conclusion

Plusieurs réflexion naissent de cette petite histoire. D'abord des faits que les habitants eux-mêmes prennent pour astrologiques (avec un rituel sacré non narré ici) ont une explication tout à fait rationnelle et les astres n'ont ici qu'une valeur d'objet d'observation. Il faut donc se méfier des faits soit disant astrologiques avérés.

D'autre part cette histoire prouve encore une fois que la prévision météo n'est plus affaire de 15 jours au maximum comme on a longtemps voulu le croire (voir la fin de l'effet papillon). Il s'agit encore une fois de tendances prévisibles des mois à l'avance (et les fermiers n'ont pas attendu les ordinateurs pour le constater), de par la mise en place de structures d'échelle mondiale se mettant en place pour un temps long (quelques mois). Il faut savoir d'ailleurs que le phénomène El Nono a des conséquences également chez nous en Europe (encore mal connues) et que ces années là le climat évolue toujours de la même façon (mais là les études sont en cours, je n'en sais pas plus pour l'instant).

Enfin, les agriculteurs du monde entier  s'efforcent de prédire les conditions climatiques des mois à venir en observant leur environnement (voir le dossier "observer la nature"). Les uns par les astres, les autres par l'observation de la faune ou de la flore, mais tous ont en commun de ne pas se résigner à subir les variabilités (inévitables et de plus en plus fréquentes) du climat. C'est la première fois qu'un mécanisme est scientifiquement mis en explication. D'autres études sont en cours et chacune est passionnante car différente d'une autre. Toutes auront au moins le mérite de renforcer nos connaissances en matières de prévisions saisonnières, nouvelle science météo que beaucoup d'hommes ont inventé il y a bien longtemps!